LOI RECONVERSION 2026

Nouvelle loi sur la reconversion 2025 : ce qui change (et ce que ça dit de notre rapport au travail)

La semaine dernière a été adoptée une nouvelle loi qui intègre une nouvelle “période de reconversion”, applicable à partir du 1er janvier 2026.
Une réforme censée faciliter les changements de carrière, offrir plus de mobilité, et “sécuriser” les transitions professionnelles.

Mais derrière les mots, que dit vraiment cette loi ?
Et surtout : que raconte-t-elle de notre manière, en France, de concevoir l’évolution de carrière ?

Je vous propose mon décryptage complet.

 Ce qui se passe : un nouveau cadre réglementaire

pour la reconversion dans une loi plus large

infographie ah LOI PERIODE RECONVERSION 2026

Une loi sur la formation et les parcours professionnels

La mesure qui parle de période de reconversion s’inscrit dans une loi plus large adoptée à l’été 2025, publiée le 23 juillet 2025, qui révise plusieurs pans du Code du travail (articles L.6324-1 et suivants).


Elle aborde à la fois :

  • la période de reconversion,

  • les entretiens professionnels,

  • la gestion de fin de carrière et les transitions internes,

  • et la simplification du financement de la formation.

L’idée : mieux articuler les dispositifs existants, tout en rationalisant les coûts.

Le principe de cette nouvelle loi sur la reconversion professionnelle

La “période de reconversion” permettra à tout salarié de bénéficier :

  • d’une mobilité professionnelle interne ou externe,

  • dans le but d’acquérir une qualification reconnue (RNCP ou bloc de compétences),

  • ou d’obtenir le socle de connaissances et de compétences professionnelles (les savoirs de base).

👉 En clair : vous pouvez vous former sans quitter votre entreprise, ou tester un nouveau métier dans une autre structure, sans rompre votre contrat d’origine.

En pratique

Public concerné : salariés en CDI ou CDD dont la qualification devient insuffisante face à l’évolution des métiers.

🏢 En interne

➡️ Le salarié reste dans l’entreprise.

Il peut changer de poste ou suivre une formation.

Il garde son contrat et sa rémunération.

L’idée est de l’aider à évoluer vers un autre métier au sein de la même structure.

🌍 En externe

➡️ Le salarié part temporairement dans une autre entreprise.

Son contrat d’origine est suspendu (pas rompu).

Il signe un CDD ou CDI temporaire ailleurs pour tester un nouveau métier.

À la fin, il peut revenir dans son entreprise d’origine ou poursuivre ailleurs s’il le souhaite.

⏱️ Durée

  • Formation ou mission : 150 à 450 heures (environ 1 à 3 mois).

  • Possibilité d’aller jusqu’à 2 100 heures sur 36 mois (soit environ 1 an et demi de formation à temps plein) si un accord de branche le prévoit.

🎓 Avec ou sans formation

La période de reconversion peut :

  • inclure une formation qualifiante (RNCP, CQP, ou blocs de compétences),

  • ou simplement être un test métier sans formation formelle, dans un autre poste ou une autre entreprise.

💰 Financement

  • Pris en charge principalement par les Opco (organismes de compétences) et les budgets formation des entreprises.

  • Le salarié peut aussi mobiliser son CPF pour compléter.

À savoir

Cette période de reconversion remplace ou complète plusieurs dispositifs existants :

  • le Projet de Transition Professionnelle (PTP) 

  • les transitions collectives (TransCo), qui n’ont jamais vraiment décollé.

En résumé :
le gouvernement cherche à regrouper, simplifier et rendre plus attractif ce qui existait déjà, mais fonctionnait mal.
L’idée est de permettre aux salariés de tester un nouveau projet sans tout risquer, et aux entreprises de gérer les reconversions autrement qu’en licenciant.

 Mon décryptage : une réforme pragmatique (mais pas neutre)

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Sur le papier, difficile de ne pas trouver cette réforme séduisante.
Elle parle mobilité, sécurisation, montée en compétences… mais derrière ces mots, il y a une logique économique et politique très claire : reprendre la main sur les parcours professionnels.

Et surtout, réduire la facture.

Le CPF est devenu une “fuite budgétaire incontrôlée”

Depuis plusieurs années, le Compte Personnel de Formation coûte très cher à l’État — plus de 2 milliards d’euros par an.

Les bilans de compétences, par exemple, ont explosé — et ils sont jugés “non productifs” à court terme.
Ils aident à réfléchir, à comprendre, à se repositionner, mais ils ne remplissent pas immédiatement les postes vacants.

Le message du gouvernement est donc clair :

“On ne veut plus financer la réflexion, mais la qualification.”

Le retrait du bilan de compétences du CPF prévu dans la loi des finances 2026 s’inscrit dans cette logique de rendement :
l’argent public doit servir à renforcer l’employabilité immédiate, pas à financer des remises en question personnelles.

Objectif : transférer la charge sur les entreprises

Avec la “période de reconversion”, l’État passe le relais.
Ce sont désormais les entreprises et leurs OPCO qui vont financer, encadrer et piloter les reconversions.
Le salarié n’agit plus seul via son CPF, mais avec son entreprise.

Autrement dit, on collectivise le coût de la reconversion :
les budgets ne viendront plus d’un compte individuel, mais des fonds mutualisés des branches professionnelles et de la formation interne.

C’est un changement profond : la reconversion n’est plus une initiative personnelle, c’est un processus co-construit.
Une manière subtile de dire : “Vous pouvez bouger, mais dans un cadre maîtrisé.”

Une logique de fond : responsabiliser et canaliser les trajectoires

Avant, avec le CPF, chacun pouvait se former librement, parfois sur son temps, parfois pour changer complètement de voie.
C’était une approche individuelle, presque libérale : “je choisis ma voie, je m’organise, je me forme”.

Avec ce dispositif et la loi en général on sent un changement de message.   
Le salarié doit désormais s’inscrire dans une logique d’entreprise, et l’entreprise devient acteur de son évolution.
Ce n’est plus un choix solitaire, mais une démarche concertée.

C’est une forme de reprise en main politique :

“Vous pouvez évoluer, mais dans un cadre cohérent avec les besoins économiques.”

Et tout est aligné pour aller dans ce sens :

  • les métiers “en tension”,

  • les qualifications certifiées (RNCP),

  • le socle de compétences “utiles”,

  • et la disparition progressive des dispositifs de réflexion personnelle (comme les bilans de compétences).

Autrement dit, la formation n’est plus un outil d’émancipation, mais un levier d’ajustement du marché du travail.

Mon avis : avantages et limites du dispositif

Ce qui va dans le bon sens

Après la vague de reconversions “Yolo” post-Covid — celles du “on n’a qu’une vie” et des formations miracles pour “trouver sa mission de vie”, il est assez sain de revenir à une approche plus réaliste et sécurisée.
Ces dernières années, certains ont quitté leur emploi trop vite, parfois sur un épuisement, et se sont retrouvés sans projet clair ou sans ressources suffisantes. Comme en témoigne Anne-Laure dans cet article, il est important de prendre son temps avant de se lancer par exemple dans la pâtisserie.

J’ai toujours mis l’employabilité au cœur de mes accompagnements parce que trouver un projet qui vous anime c’est super

MAIS il faut aussi :

  • en vivre,
  • que le salaire, la manière d’exercer, le quotidien vous plaise aussi.

Par ailleurs, on ne repart jamais de rien : nos compétences, nos expériences, nos postures sont transférables.

On a trop vu ces dernières années des discours qui promettaient qu’il “suffisait de suivre sa passion” ou de “se lancer” pour que tout s’aligne.
Donc oui, je trouve positif qu’on cherche à sécuriser les transitions et à replacer la réflexion professionnelle dans le monde du travail.

Ce qui m’interpelle et les limites (et elles sont nombreuses !)

 

Employabilité oui … mais pas comme unique critère

Quand j’ai souhaité changer de voie après 15 ans en marketing, on m’a parlé de marketing digital parce que la demande explosait … sauf que je n’avais pas envie de continuer à faire du marketing pur. En restant dans des logiques pures de transfert de compétences, d’employabilité, on peut aussi s’enfermer dans des projets qui ne collent pas aux aspirations.

Changer de métier ne peut pas être uniquement une réponse économique à un besoin de main-d’œuvre (aides à domicile, assistants de vie, chefs cuisiniers, couvreurs, maçons qualifiés, soudeurs… pour les métiers en tension par exemple).

Il y a un équilibre à trouver entre se lancer trop vite sur des projets peu viables et ne proposer que des projets “bankable” sur le papier ou en demande. Il existe beaucoup de projets à impact, ou de création d’entreprise qui sont viables et peuvent vous convenir sans pour autant apparaître dans les métiers en tension.

 

La mise en œuvre pratique

Sur le papier demander à tester en interne ou externe … c’est super !

Mais dans la réalité, c’est plus nuancé et les craintes se font sentir :

Pour beaucoup de salariés :

  • Parler de reconversion, c’est avouer une forme de désengagement.

  • Ils ont peur d’être vus comme “instables”, “ingrats” ou “en sursis”.

  • Ils craignent aussi que l’information remonte à leur manager ou RH et qu’on commence déjà à anticiper leur départ.

Pour les entreprises :

  • Certaines y voient une opportunité de mobilité interne (ce qui est le but).

  • D’autres, plus classiques, y voient un risque de contagion : “si l’un veut bouger, les autres vont suivre”.

  • Et certaines RH n’ont tout simplement ni le temps ni les outils pour accompagner des changements de voie.

 

Par ailleurs, il faut rappeler un point essentiel : la période de reconversion n’est pas un droit automatique.
La loi (articles L.6324-1 et suivants du Code du travail) prévoit qu’elle repose sur un accord bilatéral écrit entre le salarié et l’entreprise.
Autrement dit, l’employeur peut refuser la demande, pour des raisons organisationnelles ou budgétaires.
C’est donc un dispositif à double clé : il suppose des entreprises prêtes à jouer le jeu, et un salarié capable de présenter un projet solide et cohérent.

🧩 Pour comparer :
le PTP (Plan de Transition Professionnel) est plus encadré.
Le salarié qui remplit les conditions d’ancienneté peut demander un congé pour se former, et l’employeur ne peut pas refuser la demande, sauf pour des raisons précises (absence préjudiciable au fonctionnement de l’entreprise, non-respect des délais, etc.).
Il peut uniquement reporter le départ jusqu’à 9 mois maximum.
Autrement dit, le PTP offrait une garantie plus forte : un refus ne pouvait pas être arbitraire.

Dans ce nouveau dispositif, c’est plus flou.
Tout repose sur la négociation et la bonne volonté des deux parties.
Ce qui, sur le terrain, peut évidemment refroidir les demandes, surtout dans les contextes où le dialogue RH est limité ou où la confiance n’est pas installée.

3 étapes pour trouver des idées de reconversion

Ne pas confondre se former et tester et se reconvertir

Mais surtout, le vrai sujet : ce dispositif ne peut intervenir qu’en aval, pas en amont.
On ne peut pas demander à tester un projet — en interne ou en externe — tant qu’on n’a pas identifié le projet lui-même (et oui, c’est puissant comme réflexion !)

Et c’est là que beaucoup bloquent.

Qui a déjà eu des formations en anglais ou excel parce qu’aucune idée de quoi demander d’autres ? (moi !). Dans les plans d’évolution de carrière que je vous fais construire, nous listons toujours :

  • en poste
  • en interne
  • en externe / en reconversion

Mais pour savoir remplir cela, savoir ce qui a besoin de changer dans votre poste, quel autre métier pourrait vous plaire en interne à tester ou en externe … vous avez besoin de partir de vous.

C’est pour cela que je vous propose trois étapes quand vous avez envie de changement :

se connaître, trouver des idées, puis concrétiser et tester.

Une vie professionnelle épanouie dans les différentes transitions professionnelles ne commence pas par une demande de mobilité, mais par un travail de fond.

 

Ce dispositif ne peut pas être un point de départ.
Sinon, on risque de “former” des salariés qui ne savent pas encore ce qu’ils cherchent, et de transformer la changement de voie en simple requalification.

En théorie, cette phase de réflexion pourrait se faire dans les entretiens professionnels (tous les 2 ou 4 ans) qui changent aussi dans cette loi.
Mais je m’interroge ici :
les RH auront-ils plus de temps,

plus d’outils qu’aujourd’hui pour réellement permettre de faire ce travail ?

Et quid là encore de la “confidentialité” ? Quand vous vous questionnez, vous n’avez pas toujours envie (et intérêt) à dévoiler en interne vos envies de changement… qui parfois n’aboutit pas !

Dans mes accompagnements, je vois évidemment des changements 180° mais aussi des ajustements quand les personnes ont pris un temps de pause, un moment de recul.

Quid si vous allez en interne expliquer que vous avez envie de tout quitter … et puis non !

Pour aller plus loin

En 2025, alors que la santé mentale est devenue une priorité nationale,
près d’un salarié sur quatre déclare un mal-être psychologique.
Et les arrêts maladie liés au stress ou à l’épuisement sont en forte hausse (Dares / Malakoff Humanis).

Comment un salarié va-t-il demander à son employeur une pause de réflexion,
quand tout le système lui dit “forme-toi, bouge, reste utile” , quand les risques sur la suite de sa carrière sont là ? 

Tout le monde n’a pas besoin d’une formation.
Certains ont juste besoin d’un temps de pause, d’un changement de regard, d’un espace pour souffler avant de décider.

Cette loi veut réconcilier l’entreprise et la reconversion.
C’est une bonne nouvelle si elle est utilisée avec discernement.
Mais elle ne remplacera jamais la réflexion personnelle que tout changement suppose et qui nécessite aussi un endroit où tout lâcher (les doutes sur son entreprise, son poste, son chef … pas si simple en entretien de carrière !).

Ces nouveaux dispositifs seront supers s’ils sont “en plus” des précédents,

s’ils les remplacent, la perte d’espace de réflexion, de pause est à mon sens un risque réel.

A suivre dans la loi des finances à venir.

Si vous avez envie de commencer à vous connaître pour prendre la question dans le bon sens, mon guide offert est là pour ça :

Envie d’aller plus loin ensemble (et de profiter du CPF tant qu’il est encore là !)

Le programme TROUVER SA VOIE est fait pour vous avec : 

  • du contenu riche : test, lecture, exercices, développement personnel …
  • des séances pour échanger, vous booster, prendre du recul
  • et un groupe FB privé pour se soutenir avec les personnes qui ont fini ou pas l’accompagnement
AH

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